Discours d’ouverture - 29e édition du Festival des migrations, des cultures et de la citoyenneté
29e Festival des migrations, des cultures et de la
citoyenneté
Discours d’ouverture
Photo Paulo Lobo |
Monsieur
le Président de la Chambre,
Excellences, Monseigneur,
Madame
La Ministre, Monsieur le Bourgmestre,
Mesdames,
Messieurs,
Au
nom du Comité de liaison des associations d’étrangers, j’ai l’honneur d’inaugurer
cette 29e édition du Festival des migrations, des cultures et de la citoyenneté,
placée sous le signe de l’engagement et de l’échange.
Grâce
aux associations qui s’engagent au Luxembourg, mais aussi dans la Grande région,
à l’implication des nombreux bénévoles et salariés qui s’investissent depuis
des semaines dans leur organisation et surtout grâce aux nombreux visiteurs qui
nous témoignent leur confiance, le Festival des migrations des cultures et de
la Citoyenneté et le Salon du livre et des cultures du Luxembourg, peuvent être
une réussite. Nous vous remercions tous pour votre implication et sommes
heureux de vous emmener, durant ces trois jours, dans notre caravelle-monde, où
la convivialité côtoie le débat d’idée, où la littérature, le film documentaire,
côtoient des formes de cultures plus traditionnelles ou plus populaires, pour
un voyage à la croisée des peuples et des cultures.
Nous
vivons une époque difficile, économiquement et socialement, et malheureusement
nous devons tenir ce discours depuis plusieurs années déjà. L’histoire balbutie
et comme dans la première moitié du XXe siècle, des hommes, des femmes, privés
de dignité, se déplacent en fonction des possibilités de travail. Car la crise économique
provoque de nouvelles migrations internes en Europe et d’anciens pays d’immigration,
devenus entretemps des terres d’accueil renouent avec leur passé migratoire. En
Grèce, en Italie, au Portugal, en Espagne, et dans d’autres pays encore, le chômage
augmente de jour en jour et le désespoir s’installe. Pour les jeunes, qui ne
trouvent pas de travail en lien avec leur formation, pour les ouvriers et
employés qui souffrent des délocalisations, pour les immigrés de ces pays, les
premiers touchés par la crise. Le temps du voyage, que l’on pensait derrière
nous dans nos contrées privilégiées, n’est plus un souvenir mais une nécessité.
La mémoire des émigrations et immigrations de nos sociétés industrielles n’est
pas encore écrite que s’ouvre une nouvelle page dans cette nouvelle ère du tout
financier.
Plusieurs
pays européens, surtout les plus touchés par la récession économique, prennent
actuellement des mesures d’austérité qui stoppent les investissements et
augmentent les taxes et impôts. Nous voudrions dire aux responsables politiques
de notre pays que nous ne pensons pas que ce chemin sur lequel l’Europe s’est
engagée nous sortira de l’impasse. Force est de constater qu’outre les
syndicats, plusieurs éminents économistes tirent désormais la sonnette d’alarme
contre cette voie sans issue.
Que
ceux qui pensent que les investissements dans l’instruction, la formation ou
encore la culture coutent chers et ne sont pas toujours nécessaires réfléchissent
à combien pourrait coûter l’ignorance dans notre société. La méconnaissance est
génératrice d’incompréhensions, d’inégalités et probablement de xénophobie.
Au
Luxembourg aussi, le chômage continue d’augmenter, le risque de pauvreté s’accroît
dans de nombreuses familles. Nous demandons que chacun ait les mêmes chances
devant l’accès à l’éducation, devant le marché du travail. Que tous les enfants
aient la possibilité de poursuivre leurs études et se préparer ainsi à la vie.
Le système scolaire luxembourgeois se réforme actuellement sous le feu de
critiques souvent virulentes, mais force est de constater que l’ancien système,
avec son lot d’échecs et de redoublements, était loin d’être égalitaire. Nous
aimerions que ce débat s’apaise et que chacun se concentre sur l’avenir de nos
enfants dans un monde où la connaissance ne s’acquiert plus comme autrefois. C’est
pourquoi nous avons souhaité proposer une rencontre que nous souhaitons
constructive avec Mme Madame Mady Delvaux‐Stehres,
ministre de l’Education nationale et de la Formation professionnelle, demain à 14h00
au Festival.
Un
mot au sujet d’une situation qui nous préoccupe et que nous avions aussi évoquée
l’an dernier, celle des demandeurs de protection internationale. Depuis plus d’un
an, le Luxembourg est confronté à de nombreuses arrivées d’hommes, de femmes et
d’enfants venus en majorité d’anciens pays des Balkans. Nous nous sommes déjà
insurgés il y a quelques mois des conditions de vie, notamment de logement, de
ces personnes. Tout en étant conscients que la situation est difficile pour le
Gouvernement, à cause du nombre toujours grandissant de personnes qui arrivent,
nous nous permettons cependant de dénoncer vivement les mesures prises ou
ambitionnées ces derniers mois et semaines, comme la limitation des tickets de
transports ou encore l’abaissement drastique de l’aide sociale qui leur est
accordée. Ces mesures sont-elles vraiment dignes d’un pays tel que le nôtre ?
Nous
souhaitons profiter de la présence de Mme la Ministre de la Culture pour
attirer son attention sur l’évolution en une décennie des projets culturels
proposés par les associations issues de l’immigration. Comment ne pas se réjouir
de la multiplication des projets culturels portés par des acteurs pour la
majorité nés au Luxembourg avec des références culturelles issues de la
migration ? Nous en rencontrons toute l’année, peintres, musiciens, créateurs
de festival, initiateurs de soirée musicale, photographes, etc. La majorité
nous disent être accueillis au ministère de la Culture mais la plupart nous
confirment le peu de soutien financier de sa part. L’exemple du Festival peut
illustrer ce propos : si historiquement un subside annuel de la part du
Ministère nous était attribué pour nos projets culturels, depuis 2005 et la
fusion dans un fond commun des subsides de l’Etat, aucune augmentation n’est
apparue. Un festival comme celui-ci, avec un salon du livre qui a accueilli des
centaines d’écrivains du monde entier, des éditeurs du pays et d’ailleurs, des
libraires, des peintres,… devrait retenir davantage l’attention du ministère de
la Culture. Ce n’est pas tant les subsides qui viennent à nous manquer sans le
partenariat officiel de ce ministère que la reconnaissance du travail culturel
que nous réalisons depuis presque trente ans. Comme celles et ceux, porteurs de
projets aux multiples références culturelles, ce que nous demandons c’est que
la légitimité que nous trouvons auprès de ministères de la Culture d’autre
pays, auprès de l’Unesco aussi, nous soit enfin octroyée ici où nous vivons.
Il
y aurait bien d’autres thèmes à aborder, comme la reforme de la législation électorale
suite à l’expérience des élections communales d’octobre ou encore la reforme de
la loi sur la nationalité vu son succès auprès du public, mais il est difficile
de tout dire en quelques minutes. C’est pour cela que je vous invite à découvrir
les actes du Congrès des associations issues de l’immigration qui s’est tenu en
novembre dernier. Ces actes seront le fondement politique de l’action du Clae
pendant les prochaines années et dès la fin de ce Festival nous entamerons les
consultations avec le monde social, culturel et politique du Luxembourg.
Je
tiens à remercier le Ministère de la Famille et de l’Intégration et en
particulier l’Office luxembourgeois de l’accueil et de l’intégration, la Ville
de Luxembourg, l’entreprise des P&T, le Ministère du Logement et bien d’autres
encore pour leur soutien financier, ainsi que la LuxExpo pour son accueil.
Je
vous convie, après les allocutions de Madame Octavie Modert, ministre de la
Culture et de Monsieur Xavier Bettel, Bourgmestre de la Ville de Luxembourg, à
une visite des stands et au vin d’honneur offert par la Ville. Nous vous
invitons à déambuler dans les allées métissées de ce 29e Festival et à vous
rappeler que la littérature, le cinéma, la musique, la gastronomie et la vie
associative sont autant de passerelles pour rencontrer et découvrir la richesse
culturelle de notre pays, où se dessine notre histoire partagée, où nous faisons
société ensemble.
17 mars 2012
CLAE
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