Roger Manderscheid traduit en espagnol par l'écrivaine péruvienne Teresa Ruiz Rosas

Le roman kasch, e genie verschwënnt an der landschaft de l’écrivain luxembourgeois Roger Manderscheid vient de paraître en 2013 en langue espagnole, Gente de madera aux éditions Igitur (Espagne). La traduction a été réalisée par l’écrivaine péruvienne Teresa Ruiz Rosas que le CLAE avait invitée au Salon du livre et des cultures du Luxembourg en 2009 et 2011. Lors de sa seconde venue, elle fut également deux semaines en résidence d’auteur au Centre national de littérature (CNL) à Mersch. Au moment de quitter le Luxembourg, elle évoquait un projet de traduction.

Un des plus grands noms de la littérature luxembourgoise contemporaine est traduit en espagnol par une écrivaine péruvienne émigrée en Allemagne depuis des années. Le cheminement de la littérature luxembourgeoise à la littérature espagnole s’est fait par des sentiers étonnants. Comment s’est faite la rencontre ?
Teresa Ruiz Rosas : Lorsque je visite un pays, ce qui m’intéresse toujours, c’est d’abord la langue. Et comme la littérature est la manifestation la plus belle d’une langue, alors je cherche la littérature du pays... pour mieux le connaître d’une certaine façon car je suis très curieuse. En 2011, c’était mon troisième séjour au Luxembourg. La première fois, je crois que c’était en 1998, à l’occasion d’une rencontre de radios indépendantes. Et à chaque fois, à l’initiative de Paca Rimbau, nous avons visité le Centre national de littérature. Je me suis dit que, cette fois, j’allais essayer de m’approcher de la littérature luxembourgeoise.

L’œuvre de Roger Manderscheid est importante, notamment dans la diversité des genres : récit, roman, poésie, pièce radiophonique… Pourquoi ce roman kasch, e genie verschwënnt an der landschaft ?
Lors de cette résidence d’auteur, j’ai eu l’occasion de beaucoup parler avec Germaine Gœtzinger, la directrice du CNL. Je connaissais déjà son engagement, sa connaissance et sa passion pour la littérature de son pays. C’est lors de ces échanges que j’ai décidé de proposer la traduction de kasch, e genie verschwënnt an der landschaft.  Je trouvais ce roman fascinant et d’une telle originalité par ce jeu de présence à travers l’absence du protagoniste, l’obsession de l’artiste de faire vivre son ami dans ses œuvres en bois mille fois répétées... C’est pour cela que je me suis permise de changer le titre en Gente de madera... Le bois a une connotation très positive en espagnol. Et même si vers la fin, l’histoire devient un peu mélodramatique, c’est une écriture très honnête, sans imposture et aussi une critique courageuse de la société luxembourgoise... C’est peut-être, l’œuvre de maturité par exellence de Manderscheid.

La plupart des ouvrages de Manderscheid ont été traduits en allemand, parfois par l’auteur lui-même. Certains textes ont été traduits vers le néerlandais, l’anglais, le portugais. Avec Gente de madera paraît la première traduction en espagnol. Comment a-t-il-été accueilli en Espagne ?
J’ai travaillé avec la traduction allemande faite par Manderscheid lui-même. La réaction que j’ai le plus souvent entendue a été : « Est-ce-qu’il existe une langue luxembourgeoise ? Je croyais qu’au Luxembourg on parlait français... » L’accueil du roman a  commencé avec l’éditeur. Igitur est une maison d’édition indépendante, avec une excellente réputation en Espagne,  surtout en poésie. On peut trouver Gente de madera dans les librairies les plus importantes... Le roman est également vendu en Amérique Latine, notamment en Colombie.

Peut-on le trouver au Luxembourg ?
Oui, bien sûr, Gente de madera sera en vente en librairie au Luxembourg. Dans un premier temps, les personnes intéressées le trouveront au stand des éditions Ultimomondo lors des Walferbicherdeeg, les 16 et 17 novembre. Avec Guy Rewenig, nous avons prévu une présentation à Luxembourg-Ville fin novembre ou début décembre.

Vous êtes également écrivaine, romancière. Travaillez-vous actuellement sur un projet ?
Oui, oui. Je viens de publier mon 4e roman au Pérou, Nada que declarar, « Rien à déclarer », 500 pages où je questionne la traite des Femmes, la prostitution forcée à la lumière de notre époque, disons, après l’héritage de mai ‘68... Je présente un contraste avec l’image d’une femme libre qui vit sa sexualité comme elle veut... Je pense qu’on a trop mythifié les prostituées dans la littérature sans assez approfondir les questions de l’esclavage, de l’humiliation, de l’exercice du pouvoir dans une situation de vulnérabilité. Et je propose une héroïne capable de se libérer à la fin...

Propos recueillis par Claudine Scherrer
In Horizon n°121, novembre 2013




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